Sa priorité absolue: ne gaspiller aucun aliment. Après des années en tant que chef de cuisine dans les meilleurs établissements suisses et étrangers, il en a eu assez. À présent, il ne cuisine dans son propre restaurant «Mein Küchenchef» plus que ce dont il a envie et de la façon dont il le souhaite: régionale et quasiment sans gaspillage alimentaire. Mirko Buri focalise l’entretien sur le «Food Waste».
Monsieur Buri, de grand chef à cuisinier adepte du «No Food Waste», comment s’est opérée cette métamorphose?
Grâce au documentaire «Taste the Waste», qui illustre le gaspillage alimentaire sous différentes perspectives et en présente toute l’ampleur. Après le film, j’ai vécu cet instant où on s'énerve à propos de quelque chose et on pense qu’il serait temps que quelqu’un fasse quelque chose pour y remédier. Je me suis levé et je me suis dit à moi-même, ce quelqu’un, c’est toi. C’est ainsi que la métamorphose a débuté.
Près de 5 % du gaspillage alimentaire suisse (115 000 tonnes par an) est généré dans la gastronomie. Comment sensibilisez-vous vos clients à ce sujet?
Lors du service de midi, nous indiquons aux clients que nous ne servons que des petites portions, afin d’éviter les déchets. Toujours avec la possibilité pour le client de se resservir. Lorsqu’un client ne mange pas tout, nous lui demandons si nous pouvons emballer les restes pour chez lui. Le «doggy bag»* est en plein essor actuellement. Nos «doggy bags» présentent différents faits sur le thème du «Food Waste». Notre principe de fabrication conforme au «No Food Waste» est présenté sur chaque produit que nous vendons. Nous organisons également des events d'équipes, qui expliquent durant une demi-heure uniquement les faits et l’origine du gaspillage alimentaire. De plus, nous présentons régulièrement notre concept à l’occasion de salons ouverts au public et aux professionnels, ainsi que lors de rencontres familiales, dans les écoles et durant des semaines thématiques.
*Doggy Bag (littéralement: «sac à toutou») désigne en anglais différentes formes de récipients utilisés dans la restauration pour l’emballage et le transport des restes de repas commandés et non consommés entièrement. Les clients peuvent ainsi emmener les restes de leur repas pour les consommer plus tard.
Éviter le «Food Waste» ne débute pas dans la cuisine, mais déjà chez le producteur, en utilisant les légumes issus de la surproduction ou le pain de la veille. Comment avez-vous trouvé les bons partenaires ?
Nous avons mis près d’un an et demi à convaincre les agriculteurs de notre concept. Cela a été vraiment difficile. Aujourd’hui, certains d’entre eux ne peuvent plus assister à leur table ronde, parce qu’ils travaillent en collaboration avec nous. Nous nous sommes également adressés à différents marchands de comestibles, mais nous nous sommes heurtés à une incompréhension totale. D’après mon expérience, ils sont encore extrêmement loin du sujet. Nous rendons visite chaque mois à nos agriculteurs, également dans les champs. Ces relations, dans lesquelles nous nous investissons, sont primordiales pour nous. Entre-temps, nous avons si bien progressé que nous proposons chez le premier agriculteur un dîner aux chandelles avec «No Food Waste». Le plus important est de rechercher sans cesse le dialogue direct avec les producteurs et de se renseigner également directement sur les stocks résiduels et les produits présentant des défauts.
Votre objectif central est d’optimiser les processus et procédures, afin qu’aucune matière première ne se perde. Pourriez-vous nous citer trois mesures que nos lecteurs pourraient mettre en œuvre dès demain dans leur établissement?
La première mesure concerne la planification, de manière concrète, la taille de la portion. Le restaurateur commence ainsi à réfléchir à la quantité qu’il sert sous la forme d’un poids en grammes. Beaucoup «envoient» notamment le menu de midi grosso modo. En tant que deuxième mesure, je recommande de proposer activement le «doggy bag». Nous appelons déjà depuis deux ans à son utilisation et les premiers résultats commencent lentement à se montrer. Il est toutefois important de préciser que le restaurateur doit faire le premier pas et assume la responsabilité. Nous conditionnons les restes sous vide et les plaçons dans une boîte adaptée pour les ramener chez soi. Comme troisième mesure, je recommande que le chef de cuisine contrôle l’excédent après chaque service, le consigne en conséquence et procède si nécessaire à des adaptations.
Mirko Buri
En tant qu’employé de service et cuisinier de formation, Mirko Buri fait état pour son jeune âge d’un curriculum vitae déjà bien rempli, avec différents postes au sein de la haute gastronomie quatre étoiles. Diverses distinctions obtenues dans le cadre de concours internationaux viennent couronner son expérience et son savoir-faire. La création de sa propre entreprise et l’ouverture de son restaurant «Mein Küchenchef» ont représenté la consécration d’un rêve de plus. Mais il ne souhaite pas mettre ici un terme à son ascension. Il est convaincu que le «No Food Waste» peut également fonctionner chez les grands. Il aime passer le peu de temps libre dont il dispose avec sa femme et son fils – en cuisine.
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